Un jour, un disciple se présenta devant le Cheikh Alawi, le cœur lourd et les yeux emplis de larmes. Son visage trahissait une profonde tristesse, et son souffle court témoignait d’un grand trouble intérieur.
Touché par l’état de son élève, le Cheikh lui demanda doucement :
- « Qu’as-tu, mon fils ? Pourquoi ces pleurs ? »
Le disciple s’inclina humblement et répondit, la voix tremblante :
- « Seigneur, cette nuit, j’ai fait un rêve terrible. Je vous ai vu mourir… Et depuis, mon âme est bouleversée. Je ne parviens pas à trouver la paix. »
Le Cheikh, après un court silence, leva calmement les yeux vers lui et lui dit :
- « Le maître qui meurt… pourquoi le prends-tu pour guide alors ? »
Cette question tomba comme une pierre dans le silence de la pièce. Le disciple resta figé, comme si ses larmes s’étaient soudain arrêtées à mi-chemin. Il comprit, à travers ces quelques mots, que son attachement au maître était encore d’un ordre trop terrestre. Il avait mis sa foi dans la forme visible, oubliant que le véritable maître est la lumière intérieure, celle qui transcende la naissance et la mort.
Dans ce récit, un disciple exprime une détresse causée par un rêve où il voit son maître mourir. Cette réaction révèle son attachement au corps du maître, à sa présence physique. Mais la réponse du Cheikh Alawi est une invitation à une compréhension plus profonde de la voie spirituelle : le véritable guide n’est pas l’homme en chair et en os, mais ce qu’il incarne — la vérité, la sagesse, et la lumière divine.
Ne confonds pas la forme avec l’essence. Le véritable maître ne meurt jamais, car ce qu’il transmet dépasse sa personne. Il ne faut pas s’attacher aux apparences, mais à la vérité intérieure qu’elles révèlent. Le chemin spirituel commence véritablement lorsque l’élève ne dépend plus de la présence extérieure du maître, mais qu’il reconnaît cette guidance au plus profond de lui-même.
Un soir de lune voilée,
Un disciple, le cœur brisé,
Frappa à la porte du silence
Où résidait son maître en présence.
« Ô toi, lumière de mon âme,
J’ai vu, en rêve, s’éteindre ta flamme.
Ton corps gisait, sans voix, sans vie...
Et mon cœur, depuis, gémit. »
Le Cheikh leva les yeux,
Ses prunelles comme deux cieux,
Et répondit, sans émoi :
« Celui qui meurt… pourquoi fais-tu de lui ta voie ? »
Le disciple, alors, s’effondra en lui-même.
Ses larmes cessèrent, remplacées par un souffle suprême.
Il comprit que le maître, véritable,
N’est pas de chair, ni périssable.
Le guide est la Voix dans le silence,
Le Feu qui consume l’apparence,
L’étoile qui, même voilée,
Montre le sentier de l’Unité.
Le vrai maître est un miroir du Divin.
Il meurt en ce monde, mais vit en ton cœur.
Quand tu pleures sa forme, tu oublies son essence.
Cherche-le là où la mort n’a pas de pouvoir :
Au delà de la forme, où l'esprit se tint
Dans la lumière qui jamais ne s’éteint.
Le maître vit, même s’il meurt,
Son souffle danse dans nos cœurs.
Ne cherche pas chair ni demeure,
La vérité n’a point d’heure.
Un disciple aux pas incertains,
Marchait, le cœur plein de chagrin.
Il pleurait, les yeux vers la nuit,
« J’ai vu mon maître… il m’a dit adieu, sans bruit. »
Il frappa, tremblant, à la porte
Où l’esprit du Cheikh le réconforte.
Et dit, tout bas, rempli d’effroi :
« J’ai vu votre mort… et je perds la voie. »
Le Cheikh, paisible, répondit alors,
D’une voix claire, plus forte que la mort :
« Le maître qui meurt… est-ce donc lui ton guide ?
Pourquoi t’attaches-tu à l’enveloppe vide ? »
Et soudain, le disciple comprit,
Que le vrai guide est au-dedans, infini.
Non un homme, ni même un nom,
Mais une flamme, un élan, une direction.
Alors il s’assit, le cœur en paix,
Ayant trouvé Celui qui jamais ne cessait.
Dans le silence, il entendit Sa voix :
« Je suis en toi, marche avec foi. »
Derwish Alawi
Inspiré du récit
de Khalifa Benhamou (disciple et Moqaddem du Cheikh Alawi à Meknès
au Maroc, autorisé à guider), rapporté par son petit-fils Mohammed.
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