Récits - Cheikh Alawi et le père Jésuite

Un père jésuite se rendit auprès du Cheikh Alawi, espérant un échange interreligieux. Pourtant, en sa présence, il demeura totalement saisi, incapable de parler. Le regard du Cheikh, pénétrant et silencieux, le submergea. Incapable de soutenir cette lumière intérieure, il recula dans une fuite soudaine, laissant même ses chaussures derrière lui. Plus tard, il confia aux disciples du Cheikh : "C’était comme si le Christ était assis là. Je ne pouvais soutenir son regard". 

Ce témoignage illustre un fait profond de la tradition soufie : les saints musulmans ne sont pas des figures isolées, mais des héritiers spirituels des prophètes antérieurs, à travers la fonction totalisante du Prophète Mohammed ﷺ. 

Certains saints incarnent à des moments de leur vie -ou de façon continue- l’héritage d’Abraham, de Moïse, de Jésus ou d’autres envoyés, chacun étant une facette de la lumière mohammadienne (Nour Mohammadi). Ainsi, le Cheikh Alawi, dans ce moment précis, irradiait un aspect christique, celui de la lumière d’amour, de transparence, et de révélation intérieure. 

Le père jésuite, en toute sincérité, a reconnu cette présence prophétique, même sous une forme inattendue. La lumière divine ne connaît ni frontière religieuse ni costume rituel. Elle se manifeste en ceux que Dieu a choisis, selon l’héritage prophétique qu’ils incarnent. Le saint véritable est un miroir vivant de la Prophétie, et sa présence, lorsqu’elle est pure, peut renvoyer tout homme à sa propre vérité, quelle que soit sa tradition. 

Reconnaître le Christ dans un saint musulman n’est pas une confusion, mais une reconnaissance du souffle unique qui anime tous les prophètes. 

De Moïse il peut porter la rigueur, 

D’Abraham, la foi dans le cœur, 

De Jésus, la paix et la clarté, 

De Mohammed ﷺ., la totalité. 

Le saint est un livre, à lire entre les lignes, 

Où brillent les noms dans une même origine. 

Le Christ chez le Cheikh ? Ce n’est point erreur : 

C’est le sceau de l’Un, en multiples lueurs.

Inspiré de : CF. Pro Humanitate, mai 1952.