Récits- Cheikh Alawi et le rassemblement annuel

Le Cheikh Alawî organisait un rassemblement annuel pour tous les fuqarâs, soit à Mostaganem, soit à Alger. Le but de ce rassemblement était de renforcer les relations entre les fuqarâs qui ne pouvaient se voir le reste de l'année, en raison de leurs tâches quotidiennes et leur préoccupations. Des milliers (environ 6 000 personnes comme en témoigne Cheikh Alî al-Bûdlîmî) assistaient aux rassemblements, et ils se comportaient comme s'ils étaient un seul corps uni. 

Les collectivités locales et des responsables gouvernementaux ainsi que des universitaires (Talabas) étaient invités à participer afin qu'ils aient une idée de ce qu'est l'ordre Alawî. 

L'ambiance générale des rassemblements dégageait la passion ardente et l'amour. Les fuqarâs pleuraient lorsque le Cheikh al-Alawî était en leur présence, et la Hadra, ils la faisaient après la prière de l'Ishâ jusqu'aux premières heures du matin. 

Ces occasions duraient trois jours entiers. Le dernier jour, après la prière du Dohr, certains lisaient des discours qu'ils avaient préparés. Cheikh Alî al-Bûdlîmî était celui qui présentait les noms des intervenants au Cheikh qui les examinait. Les discours allaient jusqu'au salat de l'Asr. Ensuite, le Cheikh al-Alawî menait la prière lui-même ou chargeait l'un des Oulémas à la mener, et à la fin de la prière, il priait en invoquant Dieu pour l'ensemble de l'assistance, hommes et femmes, âgés et jeunes, pour les universitaires (Thalabas), pour la communauté musulmane, et pour les dirigeants musulmans.

Le statut du Rassemblement
• Le Cheikh al-Alawî invitait tous les fuqarâs, sans distinction. Il invitait également des universitaires, des responsables gouvernementaux locaux et les adeptes d'autres ordres s'ils souhaitent participer, cependant sous conditions, ils devraient respecter les statuts de l'ordre Alawî, et ne pas essayer de prendre le contrôle du rassemblement. Ils ne devraient pas réciter des poèmes ou d'accomplir un acte jusqu'à ce qu'ils aient demandé la permission de l'hôte lui-même.
• La célébration ne devait en aucun cas, et par n'importe quel moyen, entrer en conflit avec la loi divine (Sharî'a). Les frères étaient tous priés à s'asseoir ensemble et à se rappeler Dieu et enseigner aux autres l'approche de Dieu.
• Les intervenants ne devraient pas prolonger leurs discours pour que le public ne se soit pas fatigué ou lassé.
• L'organisateur de l'événement doit être un maître de la voie autorisé par un précédent maître. Il devrait également avoir les connaissances requises sur la manière d'organiser l'événement de la meilleure façon possible. Il ne devrait pas être influencé par des suggestions venant de personnes qui n'ont pas de connaissance sur la voie, ce qui pourrait mettre tout l'événement en échec.
• Tous les participants doivent venir avec l'intention d'invoquer Dieu Seul. Ils ne doivent porter que de l'amour pour leurs autres frères. Ils doivent représenter l'ordre et le respecter. Ils ne doivent pas se raser et ne doivent pas porter autre chose que la tenue vestimentaire islamique, comme une «Djellaba» blanche avec leurs chapelets accrochés autour de leurs cous, afin que les personnes présentes voient la beauté de l'ordre, et surtout la nécessité de se faire distinguer des autres, en étant les hommes de Dieu.
• Les meilleurs chanteurs doivent être choisis, et ils doivent chanter les recueils de poèmes du Cheikh al-Alawî ou de certains de ses disciples, pour que les gens écoutent ce que l'ordre a d'enseignements.
• Les fuqarâs doivent éviter de laisser assister n'importe qui, pour que l'événement ne soit pas gâché par les mauvaises conduites et le mauvais comportement de certains.
• Les participants doivent respecter les pratiques de nos pieux prédécesseurs qui nous ont apporté cet ordre. Quand ils viennent à la Zawiya ou chez l'un des fuqarâs, ils doivent entrer en disant à haute voix le témoignage de la foi. Ils ne doivent pas regarder en bas [1] ou parler d'autres sujets lors des pratiques, tels que la Hadra ou en récitant les invocations à haute voix à l'unisson, car cela pourra les nuire et gêner les autres frères.
• Il ne faut en aucun cas intercaler entre les deux sexes, tout au long de l'événement. Il doit y avoir une barrière entre eux qui empêche tout contact afin que les cœurs restent sains et pures. [2]

Notes :
[1] Sens de la phrase incompréhensible, si ce n'est, ne pas baisser la tête !?
[2] A l'époque du Cheikh al-Alawî il n'y avait pas de plaques indiquant les emplacements (hommes / femmes). Il y avait, certes, un espace spécialement pour les femmes afin d'invoquer Dieu Tout-Puissant, toute fois, il était impensable qu'on laisserait une jeune fille apparaître en compagnie d'hommes, et de même, un jeune garçon apparaître en la compagnie des femmes.

Idris, faqîr Alawî, disciple du Cheikh Būzīdī Bujrāfī, Maroc.

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