Obsèques du cheikh Hadj Adda Bentounès - L'Écho d'Oran 06/07/1952

Mostaganem, Samedi 5 juillet, à 17 heures, une foule innombrable et éplorée a accompagné à sa dernière demeure le cheikh Si Hadj Adda Bentounès, chef de la confrérie des Allaouïa, dont la zaouïa est à Tijdltt, l’important quartier musulman de Mostaganem.

Décédé le 4 juillet à 3 heures du matin, après une longue et douloureuse maladie, le cheikh Bentounès était âgé de 54 ans. Il avait pris la tête de la zaouïa le 14 juillet 1934, date du décès de son père spirituel, le cheikh Benalioua, fondateur de la confrérie. Après des études en Tunisie à l’Université de Zitouna, de Tunis, il revint dans sa ville natale et là, auprès de son maître et prédécesseur, il se consacra à l’étude de l'âme dans ses rapports avec Dieu. Bientôt il se révéla digne successeur du cheikh Benalioua et sa renommée s’étendit au-delà des mers.

Sa vie fut un constant exemple d’abnégation. Il prêchait l'amour du prochain et était un fervent artisan du rapprochement des races, pour le plus grand bien de la France. Il nous suffira de rappeler qu’il était président fondateur de l’Association des Amis de l’Islam, laquelle groupe dans son sein des gens de toutes origines, de toutes tendances et de toutes les religions.

Il sut acquérir l’estime de tous, tant Européens que Musulmans. Aussi c’est avec une profonde stupeur que le monde apprit son décès. Depuis l'annonce de cette nouvelle, de tous les coins de l'Algérie et même nous a-t-on dit, de plus loin, nombreux sont ceux qui affluèrent vers la zaouïa. Parmi eux on retrouvait non seulement ses disciples, mais encore tous ceux qui ont pu apprécier à sa juste valeur la noblesse de son œuvre.

Aux obsèques assistaient une véritable mer humaine. Près de cinq mille personnes, Musulmans, chrétiens et Israélites se coudoyaient. Sur la figure de chacun on devinait une profonde douleur, personne ne voulant croire à la pénible réalité : le cheikh n’était plus.

Parmi les très nombreuses personnalités présentes, nous avons remarqué : MM. Huertas, représentant M. le préfet, l’administrateur Grech, représentant le sous-préfet de Mostaganem, Lemoine, maire, délégué à l’assemblée algérienne, Gibaud, conseiller général et maire-adjoint, Khoussa, délégué à l'Assemblée algérienne, Boukheloua, membre de l'Union française, le député Akiki (Hakiki) Djilali, Kaznadar, président du Tribunal, Guglielmi, substitut, Cozette, juge des enfants, Pinelli, commissaire central , le capitaine Dupain, commandant la gendarmerie , Hugue, chef de la police mobile, Garrigues de la PRG, représentant le commissaire divisionnaire Labat, de nombreux membres du barreau, des avoués, des représentants des diverses associations patriotiques, le muphti Henni de Mostaganem, accompagné des membres du clergé musulman de Mostaganem et des environs, les muphtis du département, une délégation du cheikh Bentekouk Si Mohamed, M. Benbernou, représentant le Bureau de bienfaisance musulman etc…

Les condoléances furent reçues par Hadj Mehdi et Si Hadi, fils aînés du Cheikh, ainsi que par ses frères parmi lesquels l’Iman Bentounès Ménouar. Aux côtés de la famille du disparu se trouvaient les moqqadems : Bensmaïn, Benguedda, Bentria, Benguettat ben Abdallah, Bouhella Hadj Bouziane, Toubal Abdelkader et Bouala Abdelkader.

La levée du corps eut lieu à la zaouïa mère, tandis que retentissaient les you-yous stridents des femmes voilées, exprimant la résignation des hommes devant la volonté divine. Le cercueil fut déposé à la nouvelle zaouïa en vue des prières rituelles. Des milliers de fidèles participèrent à la « Salat ». Spectacle aussi grandiose qu'impressionnant. Le corps fut ensuite ramené à la zaouïa mère où il reposera selon les dernières volontés du défunt, aux côtés de son vénéré maître.

Tandis que prenait fin cette pieuse cérémonie, la foule s’écoulait lentement, commentant la disparition trop brutale de l’homme de bien, apôtre de la justice et de la charité humaine. A l'heure où nous écrivons ces lignes, des vagues de fidèles et d'amis venus de toutes parts, continuent à déferler vers la zaouïa.

La famille a reçu un grand nombre de télégrammes de condoléances et en particulier celui des représentants des amis de l’Islam.

Nous nous inclinons devant la dépouille mortelle de cet homme au grand cœur dont le souvenir restera un symbole de piété et adressons à ses proches l'expression de notre vive sympathie.

Charles LOICHEMOL.


Obsèques du cheikh hadj Adda ben Tounès. Ses obsèques se sont déroulées autour de la célèbre zaouïa des Allaouïa, en présence de plusieurs milliers d’amis et adeptes. Seul, un muphti a dit les regrets causés par la disparition prématurée d’un magnifique chef religieux de l’Islam nord-africain qui éleva ses dix enfants dans le culte... Le grand cheikh Sid Elhadj Adda Ben Tounès repose près de son père (spirituel) dans la tombe des grands chefs allaouites, où viennent en pèlerinage des foules immenses. 


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