Le paysage religieux algérien du début du XXe siècle est traversé par un foisonnement de confréries soufies, aux noms parfois proches mais aux histoires distinctes. Une publication du 1er mars 1913 dans un journal de Constantine mentionne la Zaouïa "Ailaouia" (ou Aliaouia) de Guelma, dirigée par Cheikh Mohamed Ameziane ben Ali, dit Cheikh El-Haddad. Ce document, antérieur à la Première Guerre mondiale, permet de constater que cette institution était bien connue, mais qu’elle ne doit pas être confondue avec la confrérie Alaouia fondée à Mostaganem par le célèbre Cheikh Ahmed Alawi. Cette confusion toponymique et onomastique mérite une clarification historique.
Deux Zaouïas, deux lignées spirituelles:
1. La confrérie Alawiyya (Mostaganem)
Fondée en 1911 par Cheikh Ahmed Alawi (patronyme : Benalioua) (1869-1934) à Mostaganem, la confrérie Alaouia est une branche réformée de la Châdhilia-Darqaouia. Elle s’impose rapidement comme l’un des mouvements soufis les plus influents du Maghreb et même au-delà, grâce à une intense activité spirituelle, éditoriale (revues, traités, lettres ouvertes) et pédagogique. Le Cheikh Alawi est connu pour ses prises de position sur des questions sociales (alcoolisme, colonisation, modernité), et pour son engagement dans une réforme intérieure de l’islam soufi.
2. La Zaouïa "Ailaouia" (Guelma)
La "Ailaouia" de Guelma, mentionnée en 1913, est dirigée par Cheikh Mohamed Ameziane ben Ali, dit Cheikh El-Haddad (à ne pas confondre avec un autre Cheikh El-Haddad célèbre du XIXe siècle, chef de l’insurrection de 1871). Ce Cheikh a étudié dans la région de Seddouk (Béjaïa) avant de fonder sa propre Zaouïa à Nador, près de Guelma. Sa tariqa semble tirer son nom d’un patronyme ("Ben Ali", dont la "Ailaouia"). Cette zaouïa était bien implantée localement mais ne semble pas avoir eu la même portée transrégionale que celle de Mostaganem.
Sur la confusion, quelles sont les causes et enjeux ? Pourquoi cette confusion ? Ressemblance phonétique : Alaouia (علوية) et Ailaouia/Aliaouia (عليوية) sont très proches à l’oreille et dans la translittération française.
Patronyme ou nisba similaire : Le nom "Ben Ali" peut prêter à confusion avec les filiations de la lignée Alaouia. L'ignorance des distinctions soufies locales par les journalistes coloniaux : Les publications coloniales ne faisaient souvent pas la différence entre les écoles soufies, se contentant de translittérations imprécises. Pourquoi cette distinction est importante ? Elle permet de respecter la diversité du soufisme algérien, qui ne se réduit pas aux grandes confréries connues. Elle évite de falsifier l’histoire de la confrérie Alaouia de Mostaganem, en la faisant remonter à des événements ou personnalités qui ne sont pas les siens. Elle rend justice à des figures locales spirituellement influentes comme Cheikh Mohamed Ameziane ben Ali, aujourd’hui largement méconnues.
La mention en 1913 de la "Ailaouia" de Guelma, zaouïa fondée par Cheikh El-Haddad, atteste l’existence d’une tradition spirituelle distincte de la confrérie Alaouia de Mostaganem, fondée seulement deux ans plus tôt par Cheikh Ahmed Alawi. Cette clarification permet non seulement de restaurer une rigueur historique dans l’étude des courants soufis en Algérie, mais aussi de mettre en lumière une zaouïa régionale active, enracinée dans la culture locale du Constantinois.
Derwish Alawi
Madame Manamanni Bey (ortho correcte : Malamli, famille d'origine turque de Constantine dont l'avant-dernier bey Manamanni Mohammed Ben Khan qui a gouverné le beylek de 1824 à 1826), à l’occasion de la nomination de son mari, a bien voulu nous faire parvenir la somme de 275 francs, en nous priant de la répartir de la façon suivante : 25 francs à la Bouchée de pain, 25 francs à la Goutte de Lait, 25 francs aux Dames de France, 25 francs pour le monument Damrémont, 25 francs à la Zaouia des Tidjania, 25 francs à la zaouia des Aïssaouas, 25 francs à la zaouia des Rahmania, 25 francs à la zaouia des Hamsala, 25 francs à la zaouia des Kadria, 25 francs à la zaouia des Taïbïa, 25 francs à la zaouia des Allaouïa. Nous allons procéder le plus rapidement possible à cette répartition, mais, dès maintenant, nous tenons à adresser nos bien vifs remerciements à Madame Manamanni Bey pour sa généreuse pensée.
La zaouia des Allaouïa - La Dépêche de Constantine du 01/03/1913
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