"Louange à Allah seul. Le créateur de l'univers n'a mis les hommes au monde que pour qu’il en soit adoré et loué en compensation des bienfaits immenses et infinis dont il les a comblés. N’a-t-il pas fait de des êtres qui pensent, qui s'expriment pour se comprendre et se communiquer leurs idées ? ne les a-t-il pas doués de la vue pour admirer tout ce qu'il a créé de beau et de superbe ? il leur a donné la qualité d'entendre pour écouter les diverses et multiples voix de ces innombrables créatures, il les a surtout munis d'une conscience ; véritable tribunal incarné en eux-mêmes où se jugent tous leurs actes, leurs paroles et leurs intentions.
Malgré tous ces privilèges, l'homme a toujours fait montre d'ingratitude envers son maître suprême. Comblé de bienfaits, il n'a pu en goûter la douceur et le bien-être, et c'est pour cette raison qu'Allah lui a envoyé des prophètes d'abord et des apôtres ensuite afin de le reconduire sur le droit chemin le maintenant non seulement au bonheur de ce bas monde mais encore et surtout au bonheur éternel de l'autre vie infinie.
Il existe hélas aujourd'hui certains esprits égarés qui considèrent ces grands intermédiaires entre l'homme et son créateur comme ayant cherché uniquement à satisfaire des intérêts personnels ou bien à conquérir une gloire quelconque. Quel blasphème et quelle bassesse d'esprit hélas ! le manque total de foi chez l'homme l’incite au point de méconnaître la réalité et l'évidence même des choses. Peut-on admettre que c'est grands envoyés d'Allah qui supportèrent tout bien des vexations et des persécutions de la part de leurs semblables, qui souffrirent de toutes sortes de privations et qui, malgré tout cela, ne faillirent pas un seul instant à leur devoir de prêcher l'adoption de la véritable religion qui aboutit au bonheur. Peut-on admettre que de telles souillures soient proférées à leurs encontre ? est-il logique qu’ayant cherché le bien-être de leurs semblables tout en ayant souffert eux même, ayant banni tout ce qui est contraire à l'humanité et prescrit tout ce qui est propre à adoucir la vie de l'homme tout en faisant jouir son âme de la vision constante du Très-Haut, est-il logique que ces envoyés n’aient cherché qu'à assouvir leur intérêt personnel ?
Ces pauvres d'esprit oublient que ces grands envoyés étaient en mesure de jouir avant tout autre de la paix et des bienfaits infinis que détient seule la Toute-Puissance et que malgré cela, ils préfèrent la privation et la souffrance, faisant ainsi preuve du plus grand désintéressement de la plus pure piété et de la plus haute modestie. Ce sont, du reste, ces grandes vertus qui constituèrent leur grande force morale et qui leur permirent d'influencer sur les cœurs de leurs adeptes.
Chers frères, il faudra rendre un pieu et solennel hommage à tous ces grands intermédiaires qui transmirent à leurs fidèles la connaissance réelle d'Allah, ce précieux secret demeure toujours inconnu avant leur arrivée et que nul ne pouvait acquérir sans avoir au préalable connu la souffrance et la privation, véritable remède contre l'orgueil et la vanité, les deux maux principaux qui empêchent généralement l'homme d'entendre et de reconnaître la vérité. Quant à ceux qui pouvaient dompter et conduire leur personne sur le droit chemin et finirent par recueillir le fruit de leur peine en ressentant ne eux-mêmes l'existence d'une satisfaction impérissable contre laquelle rien ne peut agir.
Nombreux sont ici présents ceux qui possèdent des notions plus ou moins grandes de cette merveilleuse connaissance d'Allah. Qu’y a-t-il de plus précieux, de plus durable, de plus satisfaisant qu'elle ? n'est-ce pas elle seule, chers frères, qui est la cause de votre amour du prochain, de votre concorde, de la lucidité et l'évolution de votre âme ? vivez en paix et apprenez que vous avez acquis le plus beau et éternel joyau qui puisse exister, aussi bien dans ce monde que dans l'autre.
Le plus illustre et dernier des prophètes Mohammed, que le salut soit sur lui, incarna en lui toutes les grandes et belles vertus, il fut un exemple inimitable de grandeur d'âme, d'indulgence, de modestie, d'honnêteté, d'abnégation et de persévérance. Il prêcha la concorde au milieu des peuples divers et divisés, constamment en querelle, mis un terme à tout ce qu'il y avait de farouche et d'inhumain dans leur mœurs, combattit leurs idoles pour les inciter à n’adorer qu’un unique et véritable maître suprême, créateur de l'univers, ce fut alors le prélude d'une véritable guerre entre l’idolâtrie ou plutôt l'hérésie et la vérité apporté par l'islam.
Ces peuplades virent tout d'abord d'un mauvais œil leurs idoles foulées au pied, si bien qu'elles se coalisèrent contre celui qui leur avait apporté une religion nouvelle qui n'admettait que l’existence d'un unique créateur éternel, présent à tout endroit et en toute circonstances. Malgré la réalisation de nombreux miracles qu'elles exigèrent de Mohammed, entre lesquels la division de la lune, elles ne purent se convaincre et continuèrent malgré cela la guerre contre l'Islam. Elles usèrent tous les moyens en leur pouvoir pour endiguer le flot envahisseur de la nouvelle religion qui mettait sur le même pied d'égalité le pauvre et le riche, prescrivait à ce dernier la restitution annuelle de la zakat qui devait servir à secourir les humbles et les infortunés. La justice était identique envers tous pour un même crime, le riche était autant puni et châtié que le pauvre, la prostitution et l'alcoolisme, c'est de grands fléaux destructeurs de la société et seuls provocateurs de la corruption des peuples ainsi que tout ce qui était propre à porter atteinte au bien-être général était banni, car l'islam est avant tout une religion sociale dont la majorité des préceptes rend à assurer à ses adeptes le bien-être ainsi qu'un doux repos et une vie de bonheur dans les deux mondes. Une société où ces calamités ont libre cours est finalement vouée à la débauche et à la décadence totale.
Malgré l'agression continue de ses nombreux adversaires, Mohammed persévérant et ayant toujours confiance en l’avenir, ne se délassa pas et poursuivit sans relâche son œuvre d'extension de l'Islam. Il fut poursuivi jusqu'à la grotte Hira où il se réfugia, mais heureusement Allah, son protecteur constant, le préserva de cette occasion, comme à toute autre, contre les griffes de ses ennemis, ces derniers mécontents, ayant toujours à cœur l'extension de la lumière de l'Islam adoptèrent une nouvelle tactique et échangèrent de procédé dans l'espoir d'arriver plus aisément à leur but. Ils essayèrent de marchander à Mohammed sa mission en lui faisant des propositions tout à fait avantageuses, entre autres celle de le désigner comme roi dont ils seraient même les fidèle et dociles sujets.
« Aucune de vos propositions, leur répondait-il, quelle que soit son importance, ne me fera dévier de mon chemin ». Ô peuple crédule, vous avez longtemps vécu dans l'ignorance, la division et l'obscurité, l'islam vous apporte la lumière, le bonheur, le bien-être, convertissez-vous en foule à ma religion. Vous n’aurez qu'à y gagner, car là Allah est infiniment riche et puissant et s’il vous ordonne de l'adorer seul et de n'obtempérer qu'à ses ordres, ce n'est nullement dans un but d'intérêt personnel, c'est au contraire et surtout pour vous élever au haut degré de l'humanité.
Quelques années s'écoulèrent et bientôt arrivèrent des diverses contrées de l'Arabie des délégations venues pour adopter l'Islam. Ainsi en un cours laps de temps, cette grande et belle religion se propagea à travers tous les pays. Il est vrai qu'on se servit souvent de l'épée pour dompter les réfractaires mais il n'en n'est pas moins vrai que nombreux sont les peuples qui se convertirent de leur propre gré préférant la liberté, l’égalité la vérité qu'ils rencontrait dans la religion de Mohammed à l'hérésie et la servitude dans lesquelles ils se débattaient auparavant.
Bientôt, ce fut un peuple plus homogène qui remplaça les anciennes peuplades désunis qui peuplaient le pays. Partout où il passait le musulman ne rencontrait plus que des frères qui le servaient avec empressement, le pleurer même quand il les quittait.
Enfin ; Mohammed, que le salut soit sur lui, ne quitta ce monde qu'après avoir bien creusé les fondements de sa religion et doté ses adeptes de la plus belle des vertus : l'amour du prochain. D’autre part, il transmit à ses plus grands et fidèles amis : Aboubacar, Otman, Omar et Ali, le plus précieux secret de la religion islamique qu’est la connaissance d'Allah. Du reste d'une grande partie des préceptes coraniques incitent des fidèles à suivre le sentier conduisant à ce secret qui n’est autre que la réalisation du bonheur éternel.
Cet objet, très cher, ne cessa d'être transmis de génération en génération par l'intermédiaire des apôtres héritiers du Prophète jusqu'à notre époque. Flattons-nous tous et réjouissons-nous d'être les adeptes de celui qui détient à l’heure présente la clé du bonheur infini, notre cher et vénéré sidi Ahmed ben Mostefa el Alawi. C’est grâce à lui si aujourd'hui nous jouissons des bienfaits de l'Islam. Antérieurement à notre adhésion à sa belle confrérie, nous étions en général plongés dans les ténèbres, livrés à la merci des temps, les caprices du plaisir, les choses superflues et tout ce qui était propre à contenter notre soi-même étaient notre seule préoccupation. Nous étions entraînés par la vague de la corruption qui mène systématiquement les gens à l'absence totale de toute foi et par suite, à la méconnaissance de tout ce qui peut leur être utile dans le présent comme dans le futur. Ce n'est qu'en suivant intégralement les prescriptions de notre cher et vénéré cheikh que nous avons pu nous dégager de l'obscurité dans laquelle nous nous débattions et connaître pour toujours le sentier menant au bonheur perpétuel.
A l’heure présente, Allah on soit loué, nous ressentons nous-même la satisfaction d'être des hommes dans toute l'acceptation du mot. Tous les préjugés que nous avions contre le prochain ont disparu et nous nous voyons aujourd'hui en nos semblables, quel que soit leur race ou leur religion, que des frères méritant tout notre respect et notre égard. Allah a créé l'homme et y a incarné le secret de lui-même. Il est donc inadmissible que nous le regardions avec dérision ou que nous lui manquions de respect. Le très haut n’a-t-il pas dit : « qui désire mon amour ? il réside dans l'amour du prochain ».
Aujourd’hui plus que jamais s'impose à nous le devoir de rendre un grand et pieux hommage à notre cher et vénéré cheikh et recommandons-nous tous mutuellement de le servir docilement, de ne voir en lui qu’un représentant de Mohammed et un reflet de la lumière divine.
Supplions tous notre créateur et évoquons sa clémence pour que, en compensation de nos prières et de notre amour pour Lui, il pardonne nos péchés, car il n’y a d'infaillible qu'Allah et ses prophètes, et nous réserve une large place dans son propre paradis".
Mohamed Larbi Mesrar de Bône (Annaba).
Le chemin du bonheur selon la conception musulmane - La Presse libre 21/12/1928
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