Dans un procès-verbal du Conseil municipal de Mostaganem, une délibération datant du mois de juillet 1924 fait état d’une mesure en faveur de deux institutions locales : La Pouponnière, située rue Grande, œuvre caritative accueillant des enfants en bas âge et la Zaouia du Cheikh Ben Alioua, centre spirituel et social fondé à Tigditt, quartier historique de Mostaganem.
Le Maire soumet au Conseil la proposition suivante : accorder à titre gratuit une concession journalière de 400 litres d’eau à chacune des deux institutions, en complément de leur quota payant habituel. Toutefois, si la consommation excède 600 litres par jour, le surplus devra être réglé par les intéressés. La mesure est adoptée sans réserve, le Conseil approuve.
La Zaouia de Tigditt, un pôle spirituel et social, fondée par Cheikh Ahmed Alawi jouait un rôle central dans la vie religieuse mais aussi sociale de Mostaganem. Lieu d’enseignement, d’accueil, d’assistance aux pauvres et d’organisation communautaire, elle répondait à des besoins collectifs dans une société où l’État colonial restait souvent distant des réalités locales.
L’octroi d’eau gratuite témoigne de la reconnaissance tacite, mais réelle, des autorités municipales quant à l’utilité sociale de cette institution. Dans une époque où les infrastructures urbaines étaient limitées, une telle mesure représentait un soutien non négligeable.
L’accès à l’eau, en contexte colonial, était encadré, rationné et tarifé. Obtenir une concession gratuite nécessitait des justifications solides : intérêt général, utilité publique ou œuvre caritative. Placer la Zaouia sur le même plan que la Pouponnière indique que les autorités locales considéraient son action comme bénéfique pour la collectivité.
L’exigence de facturer toute consommation au-delà de 600 litres par jour rappelle la volonté de maintenir un équilibre entre soutien symbolique et contrôle administratif. Il ne s’agit pas d’un privilège illimité, mais d’un encadrement souple, reconnaissant la valeur sociale des deux établissements tout en préservant les règles budgétaires municipales.
Ce petit extrait d’archives municipales publié par le journal de Mostaganem, illustre à merveille la place singulière de la zaouia Alaouia dans l’espace public colonial. Sans revêtir de statut officiel, elle était néanmoins considérée comme un acteur social respecté, digne de bénéficier de mesures de soutien au même titre qu’une œuvre humanitaire.
Cette décision, modeste en apparence, éclaire les relations complexes entre les institutions traditionnelles musulmanes et le pouvoir colonial local, oscillant entre méfiance, pragmatisme et reconnaissance implicite.
Derwish Alawi
Le Maire propose au Conseil de faire droit aux demandes formulées par l’œuvre de la Pouponnière, pour son immeuble situé rue Grande et par le Cheikh Ben Alioua pour sa Zaouia de Tigditt tendant à obtenir la concession journalière gratuite de 400 litres d’eau en plus de la concession payante dont ils sont titulaires et sous réserve que la consommation qui dépassera la quantité de 600 litres par jour sera payée par les intéressés. Le Conseil approuve.
Commentaires
Enregistrer un commentaire